lundi 14 novembre 2011

L'Union européenne trouve un accord pour débloquer l'aide aux démunis

Le Programme européen d'aide aux démunis dont bénéficient des centaines d'organisations caritatives a obtenu lundi 14 novembre un sursis de deux ans, à la suite d'un compromis franco-allemand qui risque toutefois de sceller sa disparition à terme. Ces 480 millions d'euros annuels, tirés des fonds agricoles européens et servant des repas à 18 millions de pauvres via les banques alimentaires, étaient menacés dès l'an prochain d'une réduction drastique de 80 % à la suite d'un arrêt de la Cour européenne de justice, initié par l'Allemagne.


La Cour a en effet considéré que le programme d'aide (PEAD), fondé en 1987, avait dévié de son objectif initial de redistribution des excédents agricoles, pour ne plus financer que des achats de nourriture, qui relèveraient plutôt de la politique sociale. L'Allemagne réclamait en conséquence avec le soutien de la Suède, du Royaume-Uni, du Danemark, de la République tchèque et des Pays-Bas, que le programme se limite strictement aux faibles excédents agricoles, ce qui équivalait à sa réduction très nette, voire à sa disparition. Car les surplus agricoles sont en voie de disparition.
Ces six pays formaient une minorité de blocage, qui a volé en éclats lundi quand la ministre de l'agriculture allemande a annoncé en marge de la réunion être prête à une solution transitoire, "par égard pour les organisations caritatives" qui comptent sur ces fonds. "Mais il faut que ce soit très clair : à partir du 1er janvier 2014, il n'y aura pas de politique sociale à l'échelle européenne", a-t-elle posé comme condition. "Ce qui est en jeu c'est le principe qu'à l'avenir l'Union européenne ne finance pas de politique sociale", que Berlin considère comme du ressort des Etats, a-t-elle affirmé.
COMPROMIS
L'accord de dernière minute a été trouvé à l'issue d'une difficile négociation, in extremis, entre la ministre allemande et son homologue français Bruno Le Maire. La négociation a été "difficile" et "nous avons accepté de reconnaître avec l'Allemagne que les conditions n'étaient pas réunies pour une poursuite de l'aide alimentaire après 2014 pour les prochaines perspectives financières", c'est-à-dire le prochain budget pluriannuel de l'Union européenne qui s'étalera de 2014 à 2020, a admis le Français.
Pour se conformer à l'arrêt de la Cour de justice, la Commission européenne avait proposé de financer le PEAD après 2014 sur d'autres fonds que le budget agricole : les fonds dits de "cohésion", au nom desquels l'Europe aide certaines régions plus défavorisées que d'autres. Bruxelles avait ainsi prévu dans ses perspectives financières 2,8 milliards d'euros pour l'aide aux démunis entre 2014 et 2020. Mais Bruno Le Maire a estimé que le compromis trouvé était le seul possible : "Nous n'avons laissé aucune possibilité de côté" pour sauver au moins à court terme ce programme, a-t-il affirmé.
"BONNE NOUVELLE"
Rien qu'en France, troisième pays bénéficiaire des fonds européens, 130 millions de repas sur les 440 millions généralement distribués ne l'auraient plus été dès 2012, selon les associations. Les Restos du Cœur, l'une des plus importantes associations d'aide aux pauvres en France, a salué lundi une décision "très responsable" qui évite à l'Europe une "crise humanitaire".
C'est une "bonne nouvelle" s'est félicité le président de la Fédération française des banques alimentaires (FFBA), Alain Seugé, tandis que le président du Secours populaire, Julien Lauprêtre, a fait part d'une "grande satisfaction pour tous les gens dans le besoin""Il sera important dans les mois qui viennent de se mettre autour d'une table pour voir quel autre dispositif on peut imaginer" au-delà, a souligné le président des Restos du Cœur, Olivier Berthe.


http://www.lemonde.fr/europe/article/2011/11/14/berlin-d-accord-pour-un-deblocage-de-l-aide-europeenne-aux-demunis_1603247_3214.html