mercredi 31 août 2011

L'Afrique du Sud remet en chantier sa politique de redistribution des terres

L'Afrique du Sud a remis en chantier mercredi la question ultra-sensible de la redistribution des terres dont la majorité noire a été dépossédée il y a près de 100 ans.
Le gouvernement, pour qui cette réforme est une priorité depuis l'accession de Jacob Zuma à la présidence en 2009, a évoqué des limites à la propriété étrangère, tout en appelant sa base à la "patience".
Maintes fois promise et reportée, elle vise à résorber les inégalités héritées du Natives Land Act de 1913 qui avait confiné les Noirs sur 7% du territoire, les poussant à devenir ouvriers agricoles, mineurs ou travailleurs migrants.
En même temps, a souligné le ministère du Développement rural et de la Réforme agraire dans un communiqué, "comment rompre rapidement et radicalement avec le passé sans perturber significativement la production agricole et la sécurité alimentaire ?"
"Personne dans le monde n'a de solution magique pour résoudre ces questions foncières post-coloniales", a déclaré pour sa part lors d'un point presse au Cap le ministre en charge du dossier, Gugile Kwinti, en ouvrant une période de consultations de deux mois.
"Dans notre pays, nous voulions résoudre le problème hier, ce n'est pas possible sur un sujet aussi sensible. Cela va prendre encore un peu de temps et demander de la patience", a-t-il ajouté. "Nous n'avons pas de réponse toute faite".
Depuis la fin de l'apartheid en 1994, seuls 5% des terres environ ont changé de main. A l'époque, la minorité blanche détenait 87% des terres.
L'échec est d'autant plus cuisant que là où il y a de nouveaux propriétaires noirs, ceux-ci, faute de capital, peinent à se maintenir à flot, et seules 10% des fermes transférées sont productives.
Dans son Livre vert, le gouvernement propose de privilégier la location de terres privées ou publiques, de placer des pâtures communales sous l'autorité de chefs traditionnels, mais aussi de limiter en taille les propriétés privées, et pour les étrangers, d'assortir le droit de propriété à des conditions et à des obligations.
Les détails n'ont pas été donnés, le ministre affirmant vouloir "garder le contrôle du patrimoine national que constitue la terre" et s'inspirer de ce qui se fait "partout ailleurs", sans préciser où.
Au Zimbabwe voisin, une réforme foncière menée dans la violence en 2000 a entraîné un effondrement de la production et des pénuries.
Une chose est sûre. L'objectif pour 2014 était de "redistribuer 30% des terres arables, 82 millions d'hectares en Afrique du Sud, détenues par des exploitants agricoles blancs à des aspirants fermiers noirs", a rappelé à l'AFP M. Nkwinti.
Mais l'Etat devrait sortir 40 milliards de rands (4 milliards d'euros) pour acheter ces terres et "je ne nous vois pas sortir cette somme (...)", a dit le ministre.
En 2010, un quart du budget destiné à l'acquisition de terres a servi à sauver des exploitations en perdition.
Le projet de réforme s'attaque également au problème du prix de rachat des terres aux fermiers blancs, dont certains, des exploitants expérimentés, n'hésitent pas à partir s'établir ailleurs sur le continent africain voire en Géorgie.
Les annonces ont été accueilli avec "inquiétude" par le syndicat des fermiers sud-africains AgriSA. "Par principe, nous sommes contre toute restriction à la propriété privée, simplement parce que c'est un non sens économique", a exposé à l'AFP une de leur juriste. "Je vois bien pourquoi c'est une option attirante pour le ministre et le gouvernement, mais ils n'en mesurent pas les conséquences possibles ni la complexité".
L'agriculture emploie 600.000 personnes en Afrique du Sud. La dépossession historique de la terre a rendu les Noirs dépendants du travail salarié, et est l'une des explications avancées au chômage élevé qui alimente la criminalité.
AFP

mardi 30 août 2011

Sodastream participe à la colonisation des territoires palestiniens


M6 a diffusé ce dimanche 28 Août, dans l’émission "Capital, un reportage intitulé "Mon soda chez moi : la machine à faire de l’eau gazeuse".
Ce reportage présente les produits Sodastream, leader sur le marché français, et situe clairement leur origine : « L’usine est en Cisjordanie, ce territoire palestinien situé juste derrière les barbelés. La zone est sensible, depuis plus de 40 ans elle est occupée par Israël et revendiquée par les Palestiniens ».
L’Association France-Palestine Solidarité, dans le cadre de la campagne BDS (boycott, désinvestissement, sanctions) dénonce depuis longtemps la fabrication des produits Sodastream, dans la colonie israélienne de Mishor Adumim – Maale Adumim, en violation du droit international. L’AFPS a également fait valoir que les produits vendus en France portent une mention mensongère, telle que "fabriqué en Israël" ou "fabriqué en Chine". Le contenu de ce reportage vient donc conforter les dénonciations par l’AFPS du caractère colonial de cette entreprise.

Une plainte pour "tromperie sur l’origine" a été déposée auprès du Procureur de la République de Montpellier par une consommatrice et INDECOSA-CGT, contre un magasin Darty ce produit Sodastream y ayant été vendu avec l’étiquette « Made in Israel ». Cette plainte est actuellement en cours d’examen. Un procès-verbal d’infraction concernant OPM, l’importateur de Sodastream, a été transmis au Parquet de Nantes par la Direction Départementale de la Protection des Populations de Loire-Atlantique.

Le reportage de Capital précise également : "Pour l’assemblage, il faut de la main d’œuvre. En Cisjordanie elle est moins chère qu’en Israël ; voilà pourquoi l’usine est installée ici."
L’ONG israélienne "Who Profits" a publié un rapport en Janvier 2011 intitulé : "Sodastream, étude d’une entreprise dans les colonies israéliennes". Il y est indiqué que les salariés palestiniens doivent avoir un permis de travail pour travailler dans une colonie israélienne. Le critère principal d’attribution de ce permis est de ne pas avoir commis d’action menaçant la sécurité d’Israël. Or un conflit avec un employeur est considéré comme une menace pour la sécurité. Ainsi, un salarié palestinien qui revendique auprès de son employeur court le risque de perdre son permis de travail et de ne plus pouvoir travailler dans une colonie israélienne à l’avenir. Il est donc très rare que des salariés palestiniens exigent le respect du droit du travail. De plus, étant implantée dans une colonie, l’usine Sodastream bénéficie d’avantages fiscaux du gouvernement israélien.

L’implantation de cette usine viole le droit international, notamment la 4ème Convention de Genève. Le Conseil des Droits de l’Homme de l’ONU indique d’ailleurs dans sa résolution du 24 Novembre 2010 : Les activités de colonisation israéliennes dans le territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, constituent de très graves violations du droit international humanitaire et des droits de l’homme des Palestiniens qui s’y trouvent et compromettent (…) un Etat palestinien viable, d’un seul tenant, souverain et indépendant. (Le Conseil) Se déclare profondément préoccupé par (…) le plan israélien dit "E1" prévoyant d’agrandir la colonie israélienne de Maale Adumim et de construire le mur autour, coupant ainsi davantage encore Jérusalem-Est occupée des parties septentrionales et méridionales de la Cisjordanie et isolant sa population palestinienne."

La colonisation israélienne est un obstacle majeur à la création de l’Etat palestinien et à une paix juste et durable entre palestiniens et israéliens. C’est pourquoi l’AFPS appelle à boycotter les produits des colonies israéliennes et notamment les gazéificateurs Sodastream, le faire c’est œuvrer pour la justice et pour la paix.

lundi 29 août 2011

OGM : nouveau fauchage de tournesols "mutés" dans la Drôme


Dans la nuit de samedi à dimanche, un groupe de 100 à 150 "faucheurs volontaires" a détruit une parcelle de tournesols OGM, dans la Drôme. Une opération destinée à dénoncer des "OGM cachés", selon des sources concordantes.
Un communiqué adressé à l’AFP révèle que 100 à 150 personnes ont participé, dans la nuit de samedi à dimanche, à la destruction d’une parcelle de tournesols génétiquement modifiés dans la Drôme. Selon les informations recueillies auprès des "faucheurs volontaires", cette action était destinée à "dénoncer" des "OGM cachés". A l’heure où nous écrivons, aucune interpellation n’a encore eu lieu bien qu’un document de revendication comportant 78 noms ait été transmis à la gendarmerie, indique Sciences et Avenir.
La parcelle de 5 000 mètres carrés qui a été détruite comportait des tournesols capables de résister à un herbicide utilisé dans la lutte contre l'ambroisie (une plante qui provoque de nombreuses réactions allergiques), affirment les "faucheurs volontaires" qui qualifient eux-mêmes leur action d'acte "de désobéissance civique". Cette plantation avait fait l'objet d'une présentation, fin juillet, par des techniciens pour qui cette variété de tournesol était "une réponse à ce problème de santé publique", assurent les faucheurs.
Dans leur communiqué les faucheurs fustigent cette "campagne de propagande" orchestrée notamment par "les multinationales de la semence avec le soutien d'hommes politiques" pour "imposer" cette variété "aux paysans et aux consommateurs". Ils dénoncent également "la volonté des semenciers de ne pas informer les paysans producteurs de tournesol sur la vraie nature de ce tournesol, ces semences étant étiquetées comme "issues de sélection classique"".
Deuxième action en un mois
Un courrier destiné au propriétaire de la parcelle lui explique que le tournesol est "issu de mutagenèse dirigée, technologie OGM que la directive européenne 2001-18 définit également comme telle, mais en l'excluant de son champ d'application". Les faucheurs expliquent au producteur qu'ils considèrent que "la maîtrise de l'ambroisie ne passe pas par le développement de variétés OGM et d'herbicides supplémentaires. Il s'agit d'un problème agronomique qui doit être contrôlé par des solutions agronomiques".
"Nous ne voulons pas montrer du doigt les paysans qui ont semé ces variétés car les firmes semencières et leurs distributeurs se gardent bien de les informer du caractère OGM de ces variétés", écrivent enfin les faucheurs qui en sont à leur deuxième action en un mois en Rhône-Alpes. Fin juillet, c’était plus de 200 personnes qui avaient détruit une parcelle de 100 mètres carrés de tournesol "muté" à Feyzin, près de Lyon.


source: http://www.maxisciences.com/organisme-g%E9n%E9tiquement-modifi%E9/ogm-nouveau-fauchage-de-tournesols-mutes-dans-la-drome_art16593.html

dimanche 28 août 2011

Le militant indien anti-corruption va cesser son jeûne


Un porte-parole du militant indien anticorruption Anna Hazare a fait savoir samedi 27 août que ce dernier avait accepté de mettre fin dimanche à sa grève de la faim, entamée voici douze jours, après avoir obtenu des concessions auprès des parlementaires.
La campagne de ce militant de 74 ans pour durcir la législation anticorruption a trouvé un immense écho au sein d'une population révoltée par ce fléau qui gangrène la société. Ce mouvement a aussi fortement ébranlé le gouvernement de centre-gauche, qui a tardé à prendre la mesure de la colère de la population.
PROJET DE LOI
Sa campagne s'est cristallisée sur un projet de loi anticorruption, actuellement en cours d'examen au parlement, qui vise à créer un poste de médiateur de la République devant surveiller les hommes politiques et les bureaucrates.
Anna Hazare a entamé une grève de la faim le 16 août, devenue publique trois jours plus tard sur une esplanade du centre de Delhi, pour exiger le retrait du projet de loi et l'adoption d'une version plus radicale. Ses demandes portaient sur trois points principaux et le ministre des finances, Pranab Mukherjee, a déclaré samedi que les parlementaires en avaient accepté le principe. Il s'agit de la création d'un médiateur de la République dans chacun des 29 Etats de l'Union indienne, de la rédaction d'une "charte du citoyen" et de l'extension des pouvoirs du médiateur à tous les fonctionnaires du gouvernement.

Source
http://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2011/08/27/le-militant-indien-anti-corruption-va-cesser-son-jeune_1564470_3216.html

La viande de synthèse

25/08 | 07:00 | mis à jour à 12:19 | Chantale Houzelle
Pourra-t-on un jour produire de la viande sans animaux ? Le concept alimente bien des controverses, mais relève encore de la science-fiction.

Fera-t-on un jour griller un bifteck sans boeuf sur son barbecue ? Rassurez-vous, ce n'est pas demain la veille que l'on vous servira de la viande de synthèse. Même si, sous prétexte de nourrir la population en pleine croissance des pays émergents, cette idée utopique est bel et bien en marche. Depuis une quinzaine d'années, la viande artificielle alimente pas mal de programmes de recherches menés assez discrètement dans le monde, notamment aux Etats-Unis, en Norvège ou aux Pays-Bas, où les travaux scientifiques seraient les plus avancés.
En France, le verdict d'un expert de l'Institut national de la recherche agronomique (Inra) est sans équivoque : « C'est irréaliste et non pertinent d'un point de vue économique et social », estime Jean-François Hocquette, directeur de l'unité de recherches sur les herbivores de l'Inra, à Clermont-Ferrand. «  Nous menons évidemment des recherches sur les cultures de cellules, mais uniquement à des fins médicales, pas pour la production de viande in vitro, assure-t-il. Nous sommes capables de cultiver des cellules de muscle, et seulement à petite échelle, mais pas du muscle entier et encore moins de la viande.  »

Rejet des consommateurs

Le couperet tombe aussi tranchant du côté de l'Académie de la viande : « L'hypothèse d'une production in vitro, comestible et commercialisable à une échéance prévisible, ne résiste pas à l'examen », estime son président, François Landrieu. « On peut néanmoins poursuivre les recherches en intégrant les éléments de connaissance, notamment génétiques, qui progressent très vite. Mais, à l'heure actuelle, aucun élément ne plaide vraiment pour un résultat exploitable. »
Et même si les chercheurs réussissaient un jour à en mettre au point la bonne « recette », la viande synthétique serait difficile à faire avaler aux consommateurs. « On voit déjà le rejet à l'encontre des animaux transgéniques, pourtant bien inoffensifs, et même des animaux clonés. Dans ce contexte, il n'est absolument pas possible d'envisager une production de viande artificielle à destination de l'alimentation humaine », insiste François Landrieu, qui ne veut pas accréditer la thèse que « la viande sans animaux » constitue une hypothèse viable pour la production alimentaire.
D'un point de vue technique, les scientifiques ne maîtrisent que l'étape préliminaire, à savoir la mise en culture de cellules musculaires de mammifères tels que les bovins, le porc ou la volaille. Cette technique consiste à incuber des cellules animales à 37 °C sous atmosphère gazeuse contrôlée, dans un milieu contenant tous les éléments (acides aminés, minéraux, hormones...) nécessaires à la vie cellulaire. Ces cellules musculaires, que l'on appelle myoblastes, se multiplient, puis entrent en contact les unes avec les autres pour fus ionner sous la forme de myotubes, qui se transforment ensuite en fibres musculaires. A titre de comparaison, le même processus est à la base de la régénération musculaire qui se produit in vivo, par exemple chez l'homme en cas de lésion du muscle.

Une structure en 3D

Problème : en l'état actuel du savoir-faire, la culture de cellules in vitro ne permet d'obtenir qu'une couche fine et bien peu appétissante. Impossible de reconstituer ainsi un tissu musculaire fonctionnel. Car le muscle résulte d'un assemblage de différentes populations cellulaires (myoblastes) qui sont associées à des fibroblastes, des cellules adipeuses, des vaisseaux sanguins et des cellules nerveuses qui interagissent les uns avec les autres. «  Nous ne savons pas cultiver toutes ces populations de cellules ensemble, et surtout pas avec un bon rendement dans une architecture en trois dimensions qui reproduit la tension des muscles fixés sur une carcasse. L'une des difficultés majeures est de reproduire la finesse de l'irrigation sanguine, qui apporterait les nutriments et les facteurs de croissance nécessaires aux cellules en mimant l'irrégularité des pulsations cardiaques », explique le docteur Jean-François Hocquette.
Sans parler de la saveur inimitable d'une côte de boeuf tendre et grillée à point, dont l'arôme, si apprécié des fins gourmets, est lié à la teneur en lipides. Les scientifiques ne sont pas près de savoir restituer ces plaisirs olfactif et gustatif. Au grand dam de l'association américaine de défense des animaux Peta, qui va jusqu'à offrir une prime de 1 million de dollars pour accélérer les recherches (lire ci-contre), la viande de synthèse risque fort de finir au rayon des pures utopies alimentaires.

1 million de dollars de prime

25/08 | 07:00 | Chantale Houzelle
Pour accélérer les recherches sur la viande artificielle, l'association américaine Peta (« People for the Ethical Treatment of Animals »), qui milite depuis trente ans pour la défense des animaux, offre une prime d'un million de dollars au premier scientifique qui sera capable de faire aboutir la production de la viande de synthèse. Ce montant équivaut à un dollar versé pour chaque poulet tué chaque heure aux Etats-Unis. «Nous ne nous attendons pas à ce que le monde devienne végétarien du jour au lendemain, mais la viande de synthèse peut permettre de manger éthiquement sans se priver de viande, soutient Isabelle Goetz, chargée de campagne de Peta France & Europe. La production de viande in vitro cultiverait les tissus musculaires sans os ni chair, et sans avoir recours aux ressources en énergie nécessaires à l'élevage d'un animal . »

samedi 27 août 2011

Quand la diplomatie américaine était au service de Monsanto


Des documents révélés par Wikileaks montrent que le gouvernement Bush surveillait de près les débats sur les OGM en France.

Une chercheuse soigne un plant de soja dans une serre de Monsanto à Chesterfield, dans le Missouri (Peter Newcomb/Reuters)

« L'Europe recule plutôt que d'avancer [sur la question des biotechnologies], avec la France, qui joue un rôle de premier plan, l'Autriche, l'Italie et même la Commission. Passer à des représailles montrerait clairement que la voie actuelle a un coût réel pour les intérêts européens, et pourrait aider à renforcer ceux qui soutiennent les biotechnologies en Europe. »
La prose est signée Craig Stapleton, ambassadeur américain à Paris sous l'administration Bush. Elle fait partie d'une série de câbles diplomatiques confidentiels publiés par Wikileaks cette semaine.
Truthout révèle que, dans la plupart des câbles, la France est désignée comme le principal barrage au développement des cultures OGM au sein de l'Union européenne, depuis 2007, face aux offensives de grands producteurs commeMonsantoDow Agro-Sciences ou DuPont.
Face à ce blocage, la diplomatie américaine a fait pression sur les dirigeants politiques et les représentants du monde agricole. Les télégrammes diplomatiques mis en ligne sur Wikileaks montrent les méthodes employées.

José Bové et les faucheurs inquiètent l'ambassade américaine

En 2007, l'ambassade américaine à Paris fait ainsi état ​​d'une rencontre entre les diplomates américains et trois représentants des firmes concernées. A l'époque, José Bové est candidat à l'élection présidentielle.
Un premier télégramme du 13 août 2007 inventorie les opposants français aux OGM et signale que « les autorités françaises ont confirmé qu'elles ne défendraient aucune nouvelle mesure biotech avant la tenue d'un congrès environnemental soutenu par le gouvernement », le Grenelle de l'Environnement.
Un autre « câble » rend compte de l'inquiétude des dirigeants de l'agroalimentaire américain face à l'accroissement des saccages de récoltes transgéniques.
Leur embarras porte aussi sur une « mesure qui pourrait contraindre les agriculteurs français à rendre public les emplacements de leurs plans d'OGM » :
« Ils expriment leur inquiétude face à la lenteur de l'Europe quant à l'adoption des procédés biotechnologiques et à la possible politisation des décisions prises par la France en matière de régulation, avant les élections présidentielles. »


Kosciusko-Morizet face au « Mon 810 »

Toujours en 2007, Craig Stapleton, évoque des discussions musclées, après le rejet d'un projet de loi favorable aux biotechnologies par le parlement français. Ce qui a fait échouer la labellisation du Mon 810, une variété de maïs jusque-là bannie, produit par Monsanto.
Un câble de 2008 montre qu'un an plus tard, la pilule n'est toujours pas passée. Il revient sur le débat houleux qui a opposé la secrétaire d'Etat chargée de l'écologie », Nathalie Kosciusko-Morizet à François Fillon et Jean-François Copé :
« Le gouvernement a perdu le contrôle sur la question [des OGM], y compris au sein de son propre parti. Les perspectives quant à l'avenir commercial des cultures biotechs sont des plus incertaines. Pour la récolte de maïs de 2008, c'est fichu, et il y a peu d'espoir pour les récoltes qui suivront, avant 2009 ou 2010.
Le gouvernement français sait que l'Europe fait face à des représailles à l'Organisation mondiale du commerce pour sa lenteur à approuver les biotechnologies et les interdictions illégales décidées par ses Etats membres.
Manifestement, le gouvernement français comprend que c'est le prix qu'il pourrait avoir à payer pour maintenir son moratoire sur les cultures biotechs. »


Coup dur pour l'exportation américaine

L'interdiction des OGM est susceptible de porter un sérieux coup aux exportations américaines. Selon le département de l'Agriculture américain, 97% du soja, 75% du maïs et 73% du coton qui poussent aux Etats-Unis utilisent des herbicides adaptés aux cultures transgéniques, comme le Round'up de Monsanto.
Un câble de 2007 précise :
« L'interdiction pourrait amputer les exportations vers la France de 30 à 50 millions de dollars. »
L'année suivante, la diplomatie américaine s'alarme de la sortie du documentaire de la journaliste française Marie-Monique Robin, auteure du « Monde selon Monsanto ».
Il est alors question de mettre au point des « talking points » pour mieux protéger les intérêts de Monsanto. Soit des « éléments de langage » bien rodés à servir aux détracteurs de Monsanto. Le site Dissenter cite un câble daté du 4 février 2008 :
« Le film et le livre ne diabolisent pas seulement Monsanto. Ils dénoncent aussi l'action gouvernementale américaine par son manque d'éthique et d'intégrité scientifique […]
Le livre et le films sont sur le point d'être traduits en anglais et dans d'autres langues. Le pays demande à une agence de Washington de fournir des “talking points” à utiliser face à un éventail d'interlocuteurs au sein d'une base listant les questions éventuelles. »


« Le monde selon Monsanto », l'épine dans le pied

Interviewée en 2008 par Rue89, MM Robin évoquait déjà l'extraordinaire pouvoir d'influence de la firme américaine. (Voir la vidéo)
Contactée au téléphone, elle ne se montre pas plus étonnée que ça :
« Ça ne fait que confirmer que les points soulevés dans le film les ont vraiment ennuyés : les liens entre Monsanto et le gouvernement américain, et tout le reste.
Monsanto, par le biais diplomatique, a eu assez de pouvoir pour faire en sorte que l'Espagne mette mon film dans un tiroir. Ca me prouve au moins que je n'étais pas paranoïaque. »


« Monsanto a perdu l'opinion publique depuis longtemps »

En marge du marché européen, les documents sortis par Wikileaks révèlent aussi comment les ambassades américaines font la promotion de « programmes de sensibilisation à la biotechnologie » en Afrique, en Asie et en Amérique du Sud.
Récemment, « Truthout » montrait comment Monsanto agissait en Afrique par le biais de fondations caritatives, comme celle de Bill et Melissa Gates. Des câbles publiés cette semaine confirment que les diplomates américains s'activent en Tunisie, enAfrique du Sud et au Mozambique.
Mais l'effervescence des ambassades ne change pas grand-chose à la donne. Au final, les OGM reculent dans le monde depuis deux ans. En Europe, l'Allemagne, l'Autriche, la Hongrie et la Bulgarie ont interdit le maïs Mon 810, qui exsude de la BT toxine et tue certains insectes nuisibles.
Comme quoi le lobbying « n'a pas été très efficace », conclut Monique Robin. « Malgré toutes les pressions diplomatiques américaines, Monsanto a perdu l'opinion publique depuis longtemps, de toute façon. »
Photo : une chercheuse soigne un plant de soja dans une serre de Monsanto à Chesterfield, dans le Missouri (Peter Newcomb/Reuters)



Source:
http://www.rue89.com/2011/08/27/quand-la-diplomatie-americaine-etait-au-service-de-monsanto-219541 

QUELLES SONT LES CAUSES DE LA FAMINE ?

Nous vivons dans un monde d’abondance. Selon les chiffres de l’Organisation des Nations Unies pour l’Agriculture et l’Alimentation (FAO), on produit aujourd’hui de la nourriture pour 12 milliards de personnes, alors que la planète compte 7 milliards d’êtres humains. De la nourriture, il y en a. Alors pourquoi dans ce cas une personne sur sept dans le monde souffre de la faim?

La menace alimentaire qui touche plus de 10 millions de personnes dans la Corne de l’Afrique remet en lumière la fatalité d’une catastrophe qui n’a pourtant rien de naturelle. Sécheresses, inondations, conflits armés... tout cela contribue à aggraver une situation d’extrême vulnérabilité alimentaire, mais ce ne ce sont pas les seuls facteurs explicatifs.
La situation de famine dans la Corne de l’Afrique n’est pas une nouveauté. La Somalie vit une situation d’insécurité alimentaire depuis 20 ans. Et, périodiquement, les médias nous remuent de nos confortables divans en nous rappelant l’impact dramatique de la faim dans le monde. En 1984, près d’un million de morts en Ethiopie; en 1992, 300.000 somaliens ont perdu la vie à cause de la faim; en 2005, près de cinq millions de personnes au bord de la mort au Malawi, pour ne citer que quelques cas.
La faim n’est pas une fatalité inévitable qui affecterait seulement certains pays. Les causes de la faim sont politiques. Qui contrôle les ressources naturelles (terres, eau, semences) qui permettent la production de nourriture? A qui profitent les politiques agricoles et alimentaires? Aujourd’hui, les aliments sont devenus une marchandise et leur fonction principale, nous nourrir, est mise à l’arrière plan.
On pointe du doigt la sécheresse, avec les pertes de récoltes et de bétail consécutives, comme l’une des principales explications de la famine dans la Corne de l’Afrique. Mais alors comment expliquer que des pays tels que les Etats-Unis ou l’Australie, qui subissent régulièrement de graves sécheresses, ne souffrent pas de famines extrêmes? Evidement, les phénomènes météorologiques peuvent aggraver les problèmes alimentaires, mais ils ne suffisent pas à expliquer les causes de la faim. En ce qui concerne la production d’aliments, le contrôle des ressources naturelles est la clé pour comprendre pour qui et pourquoi on les produits.
Dans plusieurs pays de la Corne de l’Afrique, l’accès à la terre et un bien rare. L’achat massif de sols fertiles de la part d’investisseurs étrangers (agro-industrie, gouvernements, fonds spéculatifs...) a provoqué l’expulsion de milliers de paysans de leurs terres, diminuant ainsi leur capacité à satisfaire leurs propres besoins alimentaires de manière autonome. Ainsi, tandis que le Programme Mondial Alimentaire tente de nourrir des milliers de réfugiés au Soudan, des gouvernements étrangers (Koweït, Emirats arabes unis, Corée...) y achètent des terres pour produire et exporter des aliments pour leurs propres populations.
Il faut également rappeler que la Somalie, malgré les sécheresses récurrentes, était un pays autosuffisant dans la production d’aliments jusqu’à la fin des années 1970. Sa souveraineté alimentaire a été mise en pièce au cours des trois décennies suivantes. A partir des années 1980, les politiques imposées par le Fonds Monétaire International et la Banque Mondiale pour que le pays puisse rembourser sa dette au Club de Paris se sont traduites par l’imposition d’un ensemble de mesures d’ajustement. En ce qui concerne l’agriculture, ces dernières impliquaient une politique de libéralisation commerciale et d’ouverture des marchés, permettant ainsi l’entrée massive de produits subsidiés - comme le riz et le blé - des multinationales agro-industrielles nord-américaines et européennes, qui ont commencé à vendre leurs produits en dessous de leur prix de production, faisant ainsi une concurrence déloyale aux produits autochtones.
Les dévaluations périodiques de la monnaie somalienne ont également provoqué une hausse des prix des intrants agricoles tandis que la politique en faveur des monocultures pour l’exportation a progressivement forcé les paysans à abandonner les campagnes. La même chose s’est produite dans d’autres pays, non seulement en Afrique, mais aussi en Amérique latine et en Asie.
La montée des prix des céréales de base est un autre des éléments désignés comme détonateurs des famines dans la Corne de l’Afrique. En Somalie, les prix du maïs et du sorgho rouge ont respectivement augmenté de 106 et 180% par rapport à l’année dernière. En Ethiopie, le coût du blé a augmenté de 85% par rapport à 2010. Et au Kenya, la valeur du maïs a augmenté de 55% en un an. Des hausses qui ont rendus ces aliments inaccessibles.
Mais quelles sont les raisons de cette escalade des prix? Plusieurs indices pointent la spéculation financière sur les matières premières alimentaires. Les prix des aliments sont déterminés dans les Bourses de valeurs, dont la plus importante, à l’échelle mondiale, est celle de Chicago, tandis qu’en Europe les aliments sont commercialisés dans les marchés à terme de Londres, Paris, Amsterdam et Francfort. Mais, aujourd’hui, la majeure partie de l’achat et de la vente de ces marchandises ne correspond pas à des échanges commerciaux réels.
On estime, d’après Mike Masters, responsable du fonds de pension Masters Capital Management, que 75% des investissements financiers dans le secteur agricole sont de caractère spéculatif. On achète et on vend des matières premières dans le but de spéculer avec elles en faisant un profit qui se répercute finalement dans l’augmentation du prix de la nourriture pour le consommateur final. Les mêmes banques, fonds à hauts risques, compagnies d’assurances, qui ont provoqué la crise des “subprimes” sont celles qui spéculent aujourd’hui avec la nourriture, profitant de marchés globaux profondément dérégulés et hautement rentables.
La crise alimentaire à l’échelle globale et la famine dans la Corne de l’Afrique en particulier sont les fruits de la globalisation alimentaire au service des intérêts privés. La chaîne de production, de distribution et de consommation des aliments est entre les mains d’une poignée de multinationales qui placent leurs intérêts particuliers au dessus des nécessités collectives. Tout au long de ces dernières décennies, elles ont miné, avec le soutien des institutions financières internationales, la capacité des Etats du sud à décider sur leurs politiques agricoles et alimentaires.
Revenons au début. Pourquoi la faim existe-t-elle dans un monde d’abondance? La production d’aliments a été multipliée par trois depuis les années 1970, tandis que la population mondiale n’a fait que doubler depuis lors. Nous ne sommes donc pas face à un problème de production de nourriture, mais bien devant un problème d’accès à la nourriture. Comme le soulignait le rapporteurs de l’ONU pour le droit à l’alimentation, Olivier de Schutter, dans une interview au journal “El Pais”: “La faim est un problème politique. C’est une question de justice sociale et de politiques de redistribution”.
Si nous voulons en finir avec la faim dans le monde, il est urgent d’opter pour d’autres politiques agricoles et alimentaires qui mettent au centre de leur préoccupation les personnes et leurs besoins, ceux qui travaillent la terre et l’écosystème. Il s’agit de parvenir à ce que le mouvement international Via Campesina appelle la “souveraineté alimentaire”, et de récupérer la capacité de décider sur ce que nous mangeons. En reprenant un des slogans les plus connus du Mouvement du 15-M: “une démocratie réelle, maintenant” dans l’agriculture et l’alimentation est nécessaire.
Esther Vivas. 
Cet article a été publié comme opinion dans le journal “El País”, 30/07/2011.